Dans un contexte où les savoirs agricoles traditionnels sont menacés par l'industrialisation et les changements climatiques, l'association Verger du Monde, fondée par Hélène Bourry Mmadi, œuvre pour la préservation et la transmission des pratiques agricoles d'ici et d'ailleurs. À travers des échanges entre agriculteurs locaux et exilés, l'association valorise des savoir-faire ancestraux tout en proposant des solutions collectives face aux défis environnementaux. Découvrez l'engagement de Verger du Monde et l'importance de ces savoirs pour un développement durable dans cette interview.
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Question : Qu'est-ce que Verger du Monde ?
Hélène Bourry Mmadi : Je suis Hélène Bourry Mmadi, directrice de Verger du Monde. C'est une association loi 1901, reconnue d'intérêt général, qui vise à valoriser les savoir-faire agricoles d'ici et d'ailleurs. Basée entre l'Île-de-France et la Bourgogne-Franche-Comté, nous organisons des échanges de pratiques entre agriculteurs locaux et exilés pour préserver et transmettre ces savoirs.
Question : Quel est le constat à l'origine de la création de l'association ?
Hélène Bourry Mmadi : En 2020, nous avons observé que de nombreux savoirs agricoles risquent de disparaître. En France, le manque de renouvellement des générations d'agriculteurs, avec beaucoup de départs à la retraite et peu de jeunes reprenant les exploitations, est un facteur clé. Par ailleurs, l'industrialisation croissante de l'agriculture, avec un modèle de production intensive, a marginalisé les gestes traditionnels et l'observation, essentiels à la transmission des savoirs. Ce phénomène n’est pas seulement local, il est global.
Question : Qu'en est-il des savoirs des agriculteurs exilés ?
Hélène Bourry Mmadi : De nombreuses personnes migrent pour fuir les conflits armés ou les conséquences du changement climatique. Certaines viennent de régions déjà touchées par des conditions difficiles, comme la sécheresse ou l'aridité, et ont développé des stratégies d’adaptation qui sont précieuses. Ces savoir-faire peuvent être partagés entre agriculteurs pour trouver ensemble des solutions aux défis environnementaux.
Question : Vous êtes aujourd'hui à l'événement Terres et Savoirs au Jardin d'Agronomie Tropicale René Dumont. Pourquoi avoir choisi ce lieu ?
Hélène Bourry Mmadi : Après plusieurs années d'existence, nous avons voulu organiser un événement pour valoriser le travail de nos agriculteurs partenaires. Nous avons choisi ce lieu symbolique pour y présenter une exposition photo qui met en lumière trois binômes d'agriculteurs locaux et exilés collaborant ensemble. C'est un cadre idéal pour promouvoir ces échanges et mettre en avant la richesse des savoirs.
Question : Quels sont les temps forts de cet événement ?
Hélène Bourry Mmadi : En plus de l'exposition, nous avons organisé une conférence-débat sur le rôle des savoirs paysans. Une table ronde aborde la gestion des ressources hydriques et la façon dont les agriculteurs du monde entier s'adaptent aux pénuries ou aux excès d'eau. Une autre, intitulée Enrichissements croisés, réunit des agriculteurs français qui cultivent des produits venus d’ailleurs, comme le thé ou le konjac, une plante d’Asie désormais cultivée en France.
Question : Quelles sont vos motivations au sein de Verger du Monde ?
Hélène Bourry Mmadi : Chez Verger du Monde, nous sommes convaincus que les défis actuels, mais surtout ceux à venir, exigent des solutions globales. Notre ambition est de réunir des personnes aux origines diverses qui partagent des savoir-faire précieux, afin de réfléchir collectivement à des solutions. Au-delà des innovations technologiques, les savoirs agricoles traditionnels jouent un rôle essentiel dans le développement durable et méritent d'être préservés.