La Vallée de la Millière, initiée par Yann Arthus-Bertrand, photographe, réalisateur et président de l’association La Vallée de la Millière, se veut bien plus qu’un simple centre de formation. Situé sur un domaine de 30 hectares protégés, ce projet est un véritable refuge pour la biodiversité. Avec le soutien du groupe LVMH, ce lieu innovant a pour mission de sensibiliser et former les collaborateurs du groupe, ainsi que le grand public, à la préservation de la nature via le Campus Life Academy. Dans cette interview, Hélène Valade, Directrice Développement et Environnement chez LVMH, et Yann Arthus-Bertrand partagent leurs perspectives sur l'importance de protéger la biodiversité et sur la vision de LVMH pour un futur plus durable.
Pourquoi est-il important pour LVMH de renouer avec la nature ?
Hélène Valade (LVMH) : La volonté est clairement de retrouver une connexion avec la nature, et cet endroit nous permet de le faire. Pourquoi est-ce si crucial ? Parce que tous les produits de LVMH sont intimement liés à la nature : pas de champagne sans vignobles, pas de parfums sans plantes, pas de belles robes sans soie. Il est essentiel de restaurer ce lien pour mieux protéger notre environnement. D’ici 2030, LVMH s’est fixé l’objectif ambitieux de préserver 5 millions d’hectares de faune et de flore. Pour y parvenir, nous développons l’agriculture régénératrice dans nos chaînes d’approvisionnement et soutenons divers projets à travers le mécénat et les partenariats.
Comment LVMH concrétise-t-il cet engagement envers la biodiversité ?
Hélène Valade (LVMH) : LVMH a une grande capacité d’entraînement, et notre rôle, en tant que leader, est de transformer chaque collaborateur en ambassadeur de la biodiversité. Nous avons mis en place le slogan "Joining Forces" pour symboliser l’union avec nos partenaires dans cette démarche. Par exemple, nous ouvrirons notre catalogue de formations à nos fournisseurs. Ce lieu, la Life Academy à la Vallée de la Millière, est aussi accessible au grand public. Nous pensons que pour réussir une transformation durable, il faut que chacun devienne un défenseur de la nature et de la biodiversité. Ensemble, nous avons plus de chances de relever les défis écologiques actuels.
Quelles sont les prochaines étapes dans cette démarche ?
Hélène Valade (LVMH) : L’objectif est de former le maximum de collaborateurs ici, avec des formations en présentiel sur divers sujets. Nous couvrons les fondamentaux de l’environnement ainsi que des compétences spécifiques, telles que l’écoconception, le sourcing responsable et l’architecture durable. Ces formations s’adressent à des publics opérationnels : acheteurs, designers, etc. Nous voulons dépasser la simple sensibilisation pour développer de véritables compétences, afin que la transformation soit profonde et durable.
Yann, pourquoi cette sensibilisation à l’extinction de la biodiversité vous tient-elle tant à cœur ?
Yann Arthus-Bertrand (La Vallée de la Millière) : Nous sommes la première génération à assister à une extinction massive de la biodiversité. Ayant étudié les lions au Kenya pendant trois ans, je suis conscient que les animaux que j’ai photographiés, comme les lions, les girafes et les hippopotames, sont aujourd’hui sur la liste rouge de l’UICN. L’humain prend de plus en plus de place, reléguant l’animal sauvage au second plan. Pendant le confinement, j’ai eu l’idée de créer le film Vivant, diffusé sur France 2, pour sensibiliser le public à la biodiversité en France. Quand un domaine de 30 hectares a été mis en vente, j’ai vu une opportunité d’en faire un lieu dédié à l’éducation et à la sensibilisation. Grâce au soutien de LVMH, nous pouvons accueillir gratuitement des enfants, des scientifiques et des ONG, ce qui est formidable.
Comment les habitants et les chasseurs perçoivent-ils ce projet ?
Yann Arthus-Bertrand (La Vallée de la Millière) : Le projet a suscité des questions, notamment de la part des chasseurs et des agriculteurs, qui se demandent qui paiera les dégâts causés par les animaux sauvages. Cependant, ce domaine ne fait que 30 hectares, au sein d’un massif de 15 000 hectares. Avec le temps, les gens commencent à comprendre l’importance de ce havre. Mon souhait est qu'il y ait de nombreux espaces similaires en France, pour favoriser le retour de la faune. Ici, la chasse n’est pas autorisée. C’est un espace protégé, comme une église où les animaux peuvent se réfugier. Je suis très fier d’avoir créé cet endroit, car j’ai l’impression de redonner à la terre ce que j’ai pu lui prendre au cours de ma vie.
Quelle est votre vision pour l’avenir de la chasse dans le cadre de la protection de la biodiversité ?
Yann Arthus-Bertrand (La Vallée de la Millière) : Je crois qu’il est possible de concilier la chasse et la préservation de la faune. Je ne suis pas opposé à la chasse et j’ai beaucoup d’amis chasseurs. Mon ambition est d’inviter les chasseurs à rejoindre cette démarche de protection. Il s'agit de trouver un équilibre entre les zones de chasse et celles où les animaux peuvent vivre en paix. J’aimerais que cet endroit serve à former et à sensibiliser, y compris les chasseurs, sur l’importance de la nature. Ce territoire n’appartient pas aux humains, mais aux animaux, et c'est ce qui le rend unique.